Congrès d’Arbitrage CAM-CCBC IX Edition : Publication des Sentences Arbitrales – Avenir ou Utopie ?

Du 17 au 23 octobre 2022, la Semaine de l’arbitrage de São Paulo (« SPAW ») a eu lieu avec de multiples événements dans différentes parties de la plus grande ville d’Amérique latine. Le SPAW est un événement collaboratif organisé par le Centre d’arbitrage et de médiation de la Chambre de commerce Brésil-Canada (« CAM CCBC »)et est conçu comme un calendrier pour les cabinets d’avocats, les universités, les associations et les institutions pour promouvoir des événements dans un environnement productif au profit du développement des ADR au Brésil.

Comme le veut la tradition, SPAW a été ouvert par la conférence d’arbitrage CAM-CCBC (« Conférence »). Dans sa IXe édition, la Conférence de cette année visait à discuter l’aujourd’hui et le demain de l’arbitrage. Abordant certains des défis les plus pertinents auxquels est confrontée la communauté arbitraire de nos jours, l’événement a fourni un excellent débat avec des praticiens de renom, comme cela est reflété dans le programme de la conférence..

Le but de cet article est d’apporter quelques points saillants sur le sujet du 4ème Panel de la Conférence (« Panel »), qui a discuté de la « Publication des sentences arbitrales : avenir ou utopie ?” Le panel était animé par le professeur Sheila C. Neder Cerezetti (Associé, Neder Cerezetti Advocacia), et a compté sur d’excellentes conférences présentées par Ank Santens (Associés, White & Case), Jean-Rémi de Maistre (Cofondatrice et PDG, Jus Mundi), et Rose Rameau (Professeur de droit et arbitre et médiateur international indépendant).

Publication des sentences arbitrales : avenir ou utopie ?

Le panel a commencé par les notes introductives du professeur Cerezetti attirant l’attention de l’auditoire sur le fait que la publication de prix n’est qu’un des nombreux problèmes liés à la dualité entre confidentialité et transparence dans les procédures arbitrales. Le professeur Cerezetti a posé des questions ouvertes que les panélistes devaient garder à l’esprit lors de leurs présentations.

La première conférence a été donnée par Mme Santens, qui a brièvement présenté un aperçu de l’histoire et de l’état actuel de la publication des sentences arbitrales. Avant d’aborder les fondements de l’arbitrage commercial, elle a souligné comment la publicité a toujours été la règle en droit maritime et au tribunal des sports ; puis elle a évoqué le développement de la publication des prix dans l’ISDS, mettant en avant l’ALENA affaires, la modification du Règlement CIRDI en 2006 et la création du Règlement de la CNUDCI sur la transparence dans l’arbitrage entre investisseurs et États fondé sur des traitésqui est adopté dans plus d’une centaine de traités d’investissement, dont quarante-trois sont déjà en vigueur.

Après cette introduction, Mme Santens a souligné que l’étape actuelle de publication des sentences arbitrales dans l’arbitrage commercial a un paysage très différent de celui de l’arbitrage d’investissement, puisqu’il traite de parties privées et d’intérêts privés. Malgré ces écarts, comme l’a souligné Mme Santens, même dans les arbitrages commerciaux, on assiste à un mouvement vers la transparence. À cet égard, Mme Santens a brièvement analysé certaines règles d’arbitrage, en les catégorisant en trois groupes, à savoir :

  1. institutions avec des règles strictes sur la confidentialité des sentences (par exemple, le Règlement d’arbitrage suisse (2021), le Règlement d’arbitrage SIAC (2016) et le Règlement LCIA (2020));
  2. les institutions entre la confidentialité et la publication des sentences (telles que les règles HKIAC (2018), les règles ICDR (2021) et les règles ICC (2021)); autre
  3. institutions par publication (telles que les Règles CIRDI (2022), les Règles CAM-CCBC (2012) et les Règles CAMARB (2019)).

Mme Santens a ensuite conclu en disant que, bien que nous assistions à un mouvement vers la transparence dans l’arbitrage commercial, il y a encore de la place pour une plus grande publication des sentences et beaucoup de choses à considérer à cet égard. Suite à une question du professeur Cerezetti, Mme Santens a également expliqué qu’il y a beaucoup moins de publication d’ordonnances de procédure, par exemple, par rapport aux sentences. Cela se traduit par le fait que la plupart des institutions arbitrales ne mentionnent même pas la publication des ordonnances de procédure dans leur règlement d’arbitrage, mais exclusivement la publication des sentences arbitrales (ICC, ICDR et ICSID seraient l’un des rares exemples qui prévoient la publication des PO) . Cependant, Mme Santens a souligné que l’on assiste à une tendance à la publication des décisions rendues par les institutions arbitrales elles-mêmes, comme le fait la LCIA depuis 2006 avec les décisions sur récusation des arbitres (et aussi HKIAC, bien que ses règles ne soient pas ‘pro publication ‘).

La deuxième présentation a été faite par Mme Rose Rameau, qui a discuté des principaux objectifs recherchés avec la publication des prix.

Premièreconsidérant son point de vue de professeure, Mme Rameau a mentionné l’importance de la publication des sentences à des fins académiques, ce qui permet de plonger dans les multiples enjeux juridiques qui peuvent survenir lors d’un arbitrage. Deuxièmeen ce qui concerne l’ISDS, elle a mentionné l’importance de la publication des récompenses aux fins de : (i) la décision d’un investisseur quant à l’endroit où investir (par exemple un investisseur ne peut pas choisir un Etat dans lequel son investissement risque fort d’être exproprié) ; ou (ii) la décision d’un État d’accepter ou non un certain investisseur sur son territoire (par exemple l’évaluation de la conduite d’un investisseur avant d’accorder l’autorisation à cet investisseur). Pour terminer, Mme Rameau a mentionné l’importance de la publication des sentences à des fins de conseil aux clients ou comme source utile pour les décisions des arbitres. Il a toutefois souligné qu’il existe une différence importante entre la jurisprudence en matière d’arbitrage commercial et d’investissement.

La troisième présentation était en charge de Jean-Rémi de Maistre, qui a discuté de l’utilisation de la publication des sentences arbitrales et comment cela pourrait être utile pour les praticiens de l’arbitrage. Il a mentionné que, malgré la prévision de la confidentialité comme quelque chose de théoriquement et potentiellement bénéfique, la publicité des sentences et des documents peut être très utile dans la création d’un environnement arbitral plus sûr. C’est précisément la portée de Jus Mundi, créé comme une plate-forme mondiale visant à fournir une source de données complètes et fiables pour chaque domaine du droit international et de l’arbitrage. Le professeur Cerezetti a demandé comment la communauté arbitrale peut parvenir à un équilibre entre transparence et confidentialité. M. Maistre a déclaré que, bien qu’il soit certain que certains aspects des procédures arbitrales doivent rester confidentiels, un certain degré de transparence est crucial pour un système arbitral meilleur et plus prévisible. M. Maistre estime qu’il est possible d’atteindre « le meilleur des deux mondes. » Selon la manière dont les informations sont divulguées, la transparence peut ne pas créer de préjudice, notamment parce qu’il ne s’agit pas de rendre publiques toutes les informations d’une procédure arbitrale, mais uniquement celles qui sont nécessaires, telles que les tribunaux, les avocats, les experts, l’industrie, etc. .

À la fin du débat, le professeur Cerezetti a conclu que cette riche discussion est extrêmement importante, surtout compte tenu du moment auquel la communauté brésilienne de l’arbitrage est actuellement confrontée, avec la menace d’un amendement controversé modifier certaines dispositions de la loi brésilienne sur l’arbitrage (« BAA ») (précédemment traité ici).

Conclusion

À la lumière de l’excellent panel, nous pouvons conclure que la communauté arbitrale souhaite un certain degré de transparence (comme l’a récemment souligné CBAr’s-IPSOS Research). La recherche CBAr-IPSOS (2021) est une recherche menée par le Comité brésilien d’arbitrage, avec l’Institut Ipsos, qui visait à enquêter sur le degré de satisfaction des multiples acteurs impliqués dans la procédure arbitrale. Soixante-treize pour cent (73%) des participants ont indiqué qu’ils étaient disposés à rendre publiques les sentences des procédures auxquelles ils participent, tant que certaines informations restent confidentielles. Par conséquent, davantage de discussions sont nécessaires pour trouver le juste équilibre entre transparence et confidentialité dans les procédures arbitrales.

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