Collections numériques des institutions GLAM : Policy Paper

Contexte

Le droit d’auteur peut représenter un défi pour les institutions culturelles (ou « GLAM » pour les galeries, les bibliothèques, les archives et les musées) lorsqu’elles poursuivent des activités de numérisation et de diffusion, car le droit d’auteur détermine si une œuvre donnée peut être utilisée et, le cas échéant, comment (comme le montrent des études récentes sur muséesles archives ou bibliothèques). Ces défis conduisent à la nécessité de soutenir les changements législatifs et/ou politiques ou au moins de clarifier les règles, afin d’éviter une sous-exploitation des collections au détriment de la société en fin de compte (une étude récente qui a conclu 20% des collections des musées européens sont disponibles en ligne).

Dans un document d’orientation, des experts du droit d’auteur et du droit de l’art dirigés par l’auteur ont clarifié les principes généraux du droit d’auteur applicables aux acteurs traitant du patrimoine culturel numérique dans le monde et ont formulé des recommandations, adressées aux décideurs politiques, pour faciliter leurs activités numériques. L’objectif principal du document est un appel à l’action et à la coopération avec les décideurs politiques et les professionnels pour libérer le potentiel des collections numériques. Le document est divisé en trois parties, chacune soulignant qui doit agir : les législateurs nationaux dans la partie I (parfois aussi les institutions culturelles et les organisations internationales) et les institutions culturelles avec un code de conduite et une procédure ADR dans les parties II et III.

Le document d’orientation n’aspire pas à être gravé dans la pierre, mais représente plutôt un travail en cours qui peut être mis à jour dans une version 2.0 avec d’autres considérations (par exemple, l’utilisation de contenu autochtone, des contrats types et/ou des lois nationales sur les limitations et exception). La première version pré-imprimée a été rédigé avec la collaboration d’universitaires de différentes universités et a conduit à une conférence internationale à Genève en 2020. Cet article résume ces conclusions.

Propositions de politique (partie I du document de politique)

Dans la partie I, nous avons développé un ensemble de 13 propositions concernant la numérisation (Propositions 1-6) et la diffusion des œuvres (Propositions 7-13). Celles-ci s’adressent aux législateurs nationaux et internationaux, ainsi qu’aux décideurs politiques au sens large. Ils peuvent être principalement mis en œuvre en clarifiant et en interprétant le cadre juridique existant.

Proposition 1. Préciser dans la loi que certains actes de reproduction réalisés dans le cadre d’une mission publique centrale de GLAM ne portent pas atteinte au droit d’auteur. Les décideurs nationaux devraient adopter ou réaffirmer les limitations et exceptions (« L&E ») au droit de reproduction, selon lesquelles le GLAM est en mesure de faire des reproductions numériques de sa collection, lorsqu’elles sont effectuées dans le cadre de la mission principale du GLAM. Ce qui constitue une mission publique essentielle doit d’abord être convenu par juridiction après consultation des parties prenantes concernées (y compris le GLAM, les artistes, les CMO et les autorités publiques compétentes).

Proposition 2. Limitations et exceptions légales au profit des institutions culturelles devrait avoir un caractère obligatoire. Les décideurs nationaux devraient veiller à ce que ces L&E aient un caractère obligatoire, en ce sens que les mesures de protection technologiques (« MPT ») ou les clauses contractuelles unilatérales (par exemple, les clauses « à prendre ou à laisser ») qui l’emportent sur les L&E devraient être inapplicables .

Proposition 3. Faciliter l’octroi efficace de licences collectives de droits, y compris, si possible, par le biais de systèmes étendus de licences collectives. Les décideurs nationaux devraient promouvoir l’octroi de licences collectives étendues (« LCE« ) des modèles (c’est à dire licences qui s’étendent aux titulaires de droits non membres sauf s’ils se sont désengagés), du moins pour les œuvres problématiques du point de vue de la gestion, telles que les œuvres orphelines, les œuvres épuisées et les œuvres indisponibles (comme le montre études). L’ECL doit travailler à l’échelle internationale et ses tarifs doivent être adaptés à la catégorie des groupes d’utilisateurs et des matériaux (par exemple, les fonds d’archives ne doivent pas être soumis à la même rémunération que les œuvres d’art uniques, comme le préconisent les universitaires). En l’absence d’un modèle ECL efficace en place, les L&E s’appliqueront à la place (voir Proposition 1).

Proposition 4. Minimiser les droits de base de données pour favoriser Accès et utilisation des œuvres numériques. Les décideurs nationaux devraient revoir sui generis droits de base de données ou droits similaires, lorsqu’ils existent, afin d’éviter de limiter l’accès et l’utilisation des œuvres du domaine public. GLAM, qui bénéficient de sui generis les droits de base de données là où ils existent (en tant que créateurs de bases de données), devraient être encouragés à leur octroyer généreusement des licences pour permettre le libre accès et la réutilisation de leurs bases de données par des tiers.

Proposition 5. Aucune protection supplémentaire du droit d’auteur accordée aux documents numérisés. Les décideurs nationaux devraient s’efforcer d’éliminer les différences entre les copies numérisées d’objets 2D et les œuvres d’art 3D (qui pourraient être protégés par le droit d’auteur, comme le papier photographique ou la toile qui a une étendue spatiale), afin d’éviter de limiter l’accès et l’utilisation des œuvres du domaine public. GLAM, dans les juridictions où les copies numérisées sont protégées par le droit d’auteur, devrait tenter de négocier les licences nécessaires avec les titulaires de droits initiaux pour permettre l’exploitation de ces images par le public.

Proposition 6. Encourager GLAM à utiliser des contenus numérisés pour l’apprentissage automatique. Les décideurs nationaux devraient adopter une position claire concernant l’utilisation des collections numériques à des fins d’apprentissage automatique. Une position aussi claire pourrait être obtenue en précisant qu’une telle utilisation ne constitue pas une violation de la loi sur le droit d’auteur sur la base des exceptions existantes (par exemple, exception générale ou spécifique pour l’exploration de textes et de données, ou interprétation de la loi sur le droit d’auteur). GLAM devrait obtenir un soutien (en termes de ressources financières et techniques ainsi que de programmes de formation), pour libérer le potentiel de leurs collections.

Proposition 7. Préciser dans la loi que certains actes de communication au public menés dans le cadre de la mission d’intérêt général d’un GLAM ne portent pas atteinte au droit d’auteur. Les décideurs nationaux devraient adopter ou réaffirmer les L&E au droit de communication au public, selon lequel GLAM est en mesure d’afficher des copies numériques de leurs collections, au moins à des fins d’exposition, d’éducation et de recherche (à la fois sur place et en ligne).

Proposition 8. Aucune responsabilité de GLAM s’il respecte certaines mesures de diligence raisonnable (semblables à la «déclaration de droit de sphère de sécurité»). Les décideurs politiques nationaux devraient encourager le GLAM à établir un code de conduite, en précisant que ce code constitue une norme internationale et que le GLAM qui suit le code de conduite bénéficie d’une sphère de sécurité protégeant contre les litiges abusifs. Les titulaires de droits conserveraient toutefois le droit de demander une injonction (sans dommages et intérêts) s’ils allèguent que ces opérations portent atteinte à leurs droits.

Proposition 9. Promouvoir l’élaboration de lignes directrices nationales sur le droit d’auteur ou de codes de pratiques professionnelles pour diverses utilisations des œuvres par charme Les organisations internationales multipartites devraient promouvoir des lignes directrices et des bonnes pratiques adoptées en commun qui, une fois suivies, permettraient au GLAM de bénéficier d’une sphère de sécurité (voir la proposition 8).

Proposition 10. Réaffirmer le critère de ciblage pour le GLAM en ligne afin d’éviter l’applicabilité de lois étrangères inattendues. Les décideurs politiques et/ou les tribunaux devraient expressément rejeter « l’approche de l’accès » (ici, ici et ici) en faveur d’une « approche par ciblage » dans les affaires de violation du droit d’auteur en ligne, c’est-à-dire d’analyser si oui ou non un site Web dirige ou cible ses activités vers un pays spécifique (indépendamment du fait qu’un site Web peut être simplement accessible dans pays de recherche). GLAM devrait adopter une approche de ciblage pour ses collections en ligne afin d’éviter l’applicabilité de juridictions inattendues ou de lois étrangères inattendues.

Proposition 11. Élaborer un cadre politique de « données ouvertes » pour charme Les organisations sectorielles internationales, telles que l’ICOM et l’OMPI, devraient adopter ou promouvoir des mesures qui facilitent la mise à disposition des ressources culturelles en tant que données ouvertes (par exemple en développant un cadre politique de données ouvertes pour GLAM, en créant des licences ouvertes interopérables spécifiques au secteur et en résolvant les problèmes de propriété intellectuelle (voir Propositions 1, 5, 7 et 12)).

Proposition 12. Promouvoir l’interopérabilité des différents modèles de licence. Les décideurs politiques nationaux devraient adapter leur législation à l’ère des licences ouvertes en ce sens que les auteurs devraient être autorisés à renoncer à leur droit à l’intégrité par le biais de licences ouvertes standardisées avec une description explicite de ce que la renonciation englobe.

Proposition 13. Incitations à maintenir à jour les outils numériques et les enregistrements d’objets (et à éviter l’obsolescence). Les décideurs politiques nationaux devraient déclarer l’obligation de préserver le patrimoine culturel numérisé dans le cadre des conventions internationales existantes, afin d’assurer l’accessibilité à long terme à l’information numérique pour les générations futures (associée à des ressources financières et humaines si elles s’adressent aux institutions culturelles).

Code de conduite pour une sphère de sécurité (partie II du document d’orientation)

Nous proposons également un code de conduite que les institutions culturelles peuvent suivre lorsqu’elles poursuivent des activités de numérisation et de diffusion, afin de se conformer à l’état actuel du droit et ainsi bénéficier d’une exonération de responsabilité (safe harbour).

Mode alternatif de règlement des litiges (ADR) (Partie III du Policy Paper)

Dans la partie III, nous proposons une procédure ADR pour aider les institutions culturelles et les titulaires de droits à trouver des solutions satisfaisantes en cas de litiges relatifs à la numérisation ou à la diffusion des œuvres. Une telle procédure peut être facilement mise en œuvre et administrée par l’une des organisations internationales multipartites, telles que l’OMPI qui possède déjà une longue et fructueuse expérience en ADR. En cas de litige, par exemple lorsqu’un titulaire de droits allègue une violation du droit d’auteur par un GLAM, un titulaire de droits peut notifier une réclamation à laquelle le GLAM répondra en remplissant le questionnaire suivant, afin que le titulaire de droits ait un aperçu complet de la situation et les intentions de GLAM. Le titulaire des droits peut alors répondre (dans le tableau ci-dessous, « A » et « D » signifient respectivement d’accord, pas d’accord). Cela permet aux parties de voir où elles en sont de manière standardisée et de circonscrire les questions à négocier entre les parties directement ou devant un médiateur.